Fin de vie
En 2005, le Parlement a adopté une loi relative aux droits des malades et à la fin de vie, dite loi LÉONETTI. Elle pose un certain nombre de principes :
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pas d’acharnement thérapeutique, qui prolongerait inutilement la vie
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le malade a le droit de refuser un traitement
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le médecin doit tout mettre en œuvre pour soulager la douleur du patient
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chacun peut exprimer par avance ses souhaits pour organiser ses derniers moments.
Cette loi qui envisage les différents cas auxquels les médecins peuvent être confrontés, est un excellent texte d’équilibre entre droits du malade et devoirs du soignant. Malheureusement, il n’est pas assez connu, plus de 2/3 des Français ignorent, par exemple, que la loi LÉONETTI interdit l’acharnement thérapeutique.
Le Président de la République a souhaité rouvrir le débat sur la fin de vie. Était-il judicieux de créer un nouveau débat sociétal ? Certainement pas. Il s’agit d’un sujet, où, bien souvent, les postures, les prises de position sont caricaturales et fondées sur des a priori, des émotions liées à telle ou telle affaire mise en exergue, sans le recul nécessaire, par les médias.
Un projet de loi sera débattu à l’Assemblée Nationale dans les prochains jours. Il comporte deux réformes importantes par rapport au texte de la loi LÉONETTI :
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l’autorisation de la sédation profonde et continue qui consiste à endormir le patient, sans entraîner la mort, lorsque sa souffrance physique ou psychique ne peut plus être assumée par des traitements adaptés.
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les directives anticipées : c’est la possibilité donnée à chacun de donner des indications sur la façon dont il souhaite ou non bénéficier de la médecine lorsqu’il sera inconscient. Ces directives devenant contraignantes mais non opposables pour laisser une marge d’appréciation aux médecins.
Les partisans de l’euthanasie parlent du « droit à mourir dans la dignité. » C’est pourtant le cas avec les soins palliatifs. Que signifie, alors, le terme de dignité ? La personne souffrante perdant de ses capacités intellectuelles ou physiques, perd-elle sa dignité ou une part de celle-ci ? La dignité de la personne est constitutive de l’être humain, elle est intrinsèque. C’est pourquoi, il ne saurait être question de la rendre proportionnelle ou fonction de quelque chose, en l’occurrence de l’état de santé, de vigilance, de conscience, de l’apparence physique ou encore du niveau de dépendance.
L’offre de soins palliatifs est la meilleure réponse à la demande d’euthanasie ou de suicide assisté. C’est d’ailleurs l’avis des spécialistes, comme le Président de la Société Française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs, le Docteur Vincent Morel qui déclarait au journal Ouest-France le 5 octobre 2012 : « Lorsqu’un patient qui demande à mourir est pris en charge par une équipe compétente, la demande d’euthanasie disparait. »
Mais il existe, malheureusement, de fortes inégalités territoriales dans l’accès aux unités de soins palliatifs. Le gouvernement annonce, pour 2015, un nouveau plan triennal pour le développement des soins palliatifs. Il est grand temps de passer de l’incantation à l’action. Il faut créer de nouvelles unités et former le personnel soignant. Aujourd’hui, moins de 3% des médecins généralistes ont reçu une formation à l’accompagnement des malades en fin de vie !
Il est à craindre qu’une partie des députés socialistes profitent du débat en séance publique pour déposer un amendement favorable à une aide active à mourir. Légiférer sur l’euthanasie, comme certains le souhaitent, c’est légiférer sur le droit de donner la mort. En l’acceptant, le législateur ferait sauter un interdit essentiel, en contradiction avec l’Article 3 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme qui stipule que : « Tout individu a droit à la vie. » Quel serait ce pays, la France, qui a supprimé la peine de mort et qui instaurerait un droit à tuer ? Quelle serait cette société qui autoriserait à donner volontairement la mort ? Le droit doit poser des interdits à la transgression.
Il faut souhaiter que les parlementaires dépassent les clivages partisans pour voter un texte qui fasse non pas l’unanimité mais consensus et qu’ils ne dérogent pas aux principes qui fondent notre vivre ensemble. Ce serait quitter l’état de culture pour revenir à l’état de nature.